Lettre 4037 de Jean-Frédéric I Ostervald à Jean-Alphonse Turrettini

Lettre autographe, signée. Inédite. (F)
Bibliothèque de Genève, Ms fr 491 (f.120-121)

J'ai recu par Monsr

Ostervald doit à JA d'avoir reçu, par Gradelle, le livre de Serces [Traité sur les miracles] dont il a déjà lu une bonne partie. C'est dans l'ensemble un livre très solide même s'il y a quelques objections auxquelles l'auteur ne répond pas de façon très satisfaisante et le style devrait être ici et là corrigé. Ce qu'il dit de [Samuel] Werenfels ne l'étonne pas du tout parce que lui-même n'avait pas été, en son temps, entièrement convaincu des éclaircissements de leur ami bâlois. Il se rappelle que, quand Werenfels était à Neuchâtel, Ott et [Charles] Tribolet lui avaient fait des objections sur sa dissertation des miracles auxquelles il n'avait pas très bien répondu. Il est pratiquement impossible de répondre aux objections quand on n'a pas un système qui se tienne; et c'est ce qu'on peut dire de celui de Werenfels sur les magiciens d'Égypte. Ostervald remercie aussi JA du très bel exemplaire des dissertations qu'il lui a offert [Disputationes, 1717-1728] ; l'édition en est magnifique mais ce n'est pas la meilleure qualité du livre. Ostervald a vu ce que [Jean I] Barbeyrac, ou l'auteur de la Bibliothèque raisonnée, dit de sa morale latine; il a lu la Morale des Pères de cet auteur et l'a beaucoup appréciée, notamment en ce qu'elle dit de la tolérance. Il aurait quand même aimé que l'auteur, tout en condamnant à juste titre certaines pensées des Pères sur la morale, eût souligné leur utilité. Leurs apologies sont, au fond, d'excellentes pièces où l'on trouve des preuves précieuses qui seraient perdues si on n'avait pas ces ouvrages. En outre la lecture des Pères est très instructive pour ce qui concerne et l'histoire et la doctrine, et l'ordre et la discipline de l'Église. Il a toujours été frappé de constater que toutes les apologies ont toujours posé comme fondement de la religion le système de la liberté et ont toujours combattu le fatum. On voit cela dans Chrysostome, dans Basile etc. Aujourd'hui, parmi les réformés, le système de la liberté est considéré comme une hérésie alors que l'orthodoxie est représentée par la doctrine du fatum qui détruit toute religion. C'est un grand argument que celui que l'on tire du consentement de l'Église grecque et de tous les Pères avant Augustin. Ostervald prie JA de transmettre à Wake ses vœux et ses pensées respectueuses, qui sont aussi celles de la Compagnie qui le regarde comme son patron. Il est de plus en plus navré de voir tous les livres pernicieux qui se publient en Angleterre; pour comble de malheur, on les traduit et les journalistes s'empressent d'en donner des détails dans leurs périodiques. Il y a quelque chose de terriblement hardi dans le génie des Anglais; ils ne se retiennent aucunement ni en religion, ni en politique ni dans le gouvernement. De plus, en général, la licence devient affreuse parmi les réformés. Les principes dangereux de Thomasius se répandent en Allemagne et il sait qu'à Bâle on les pousse très loin. On en sera bientôt à quelques restes de la religion naturelle. Ostervald prie quotidiennement pour la conservation de JA.

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[Genève]

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RĂ©ception

Genève

Conservation

Genève

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