J'ay bien reçû l'honeur
Roberthon a reçu la lettre de JA et la requête qui y est jointe pour les Églises vaudoises. Il n'a rien à se reprocher; il a travaillé auprès de Sa Majesté [George I] pour la continuité de la pension que la feue la reine [Marie II] leur avait donnée et à laquelle participaient les Églises du Wurtemberg. Mais les gens de la Trésorerie, qui sont des personnes peu charitables, ne l'ont pas secondé. [Robert] Walpole a alors suggéré de prendre cette pension sur les revenus de l'Hôpital de la Savoie,...
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Lettre autographe, signée. Inédite. (F) Bibliothèque de Genève, Ms fr 492 (f.158-159)
Roberthon a reçu la lettre de JA et la requête qui y est jointe pour les Églises vaudoises. Il n'a rien à se reprocher; il a travaillé auprès de Sa Majesté [George I] pour la continuité de la pension que la feue la reine [Marie II] leur avait donnée et à laquelle participaient les Églises du Wurtemberg. Mais les gens de la Trésorerie, qui sont des personnes peu charitables, ne l'ont pas secondé. [Robert] Walpole a alors suggéré de prendre cette pension sur les revenus de l'Hôpital de la Savoie, qui a été aboli depuis longtemps et dont les revenus ont été réunis à la couronne qui les emploiera à des usages pieux. Le roi [George I] a donné son accord mais, à ce moment-là , Walpole, qui est commissaire de trésorerie, dit qu'il ne paierait qu'avec une attestation du procureur général qui garantisse que l'usage sera conforme aux règlements, puisque cet argent doit sortir du royaume. Contre l'attente de celui-ci et après une négociation de trois mois à laquelle participa aussi l'archevêque de Cantorbéry [Wake] et l'évêque de Londres [John Robinson], Roberthon put obtenir du procureur cette référence, qui fut envoyée aux commissaires par ordre du roi avec l'injonction de s'y conformer et d'établir la pension sur les revenus de l'hôpital. Roberthon croyait l'affaire terminée mais Walpole a refusé de payer sans une autorisation du Parlement. Sur cela le roi et Roberthon sont partis pour Hanovre où Sa Majesté se refuse à traiter de telles affaires, remises donc à son retour; Roberthon s'engage à faire avancer l'affaire à ce moment-là . Il a pourtant déjà fait quelque chose avant son départ; il a en effet pu récupérer l'argent d'une collecte que [Philibert] Herwart, ancien envoyé de Guillaume III en Suisse, avait reçu pour de nouveaux bâtiments ecclésiastiques pour les Vaudois dans le Wurtemberg et qui n'avait pas été utilisé. Cet argent servira à payer les arriérés mais sera distribué aussi aux Vaudois du Piémont. Pour ce qui est de la pension, Roberthon reconnaît que le plus simple aurait été de la mettre sur la liste civile du roi mais, pour éviter cela, Walpole a proposé les revenus de l'Hôpital. Il ajoute qu'il faut dire aussi que le roi a beaucoup fait pour les réfugiés d'Angleterre; il lui donne les détails financiers des engagements de Sa Majesté aussi bien dans le pays qu'en Irlande. Il a aussi procuré de grands soulagements en France aux gens de la religion. Roberthon pense que la réunion des protestants est impraticable; il suffit qu'ils se tolèrent mutuellement et se regardent comme des frères, ce à quoi il faut travailler. Pour le roi, qui est le chef de l'Église, se réunir voudrait dire ramener à l'anglicanisme les autres confessions, ce qui serait dommage compte tenu du fait que cette Église est la plus corrompue et la plus proche du papisme; cela est vrai surtout de la Haute Église qui est pourtant majoritaire. Ses ecclésiastiques voudraient instituer une véritable tyrannie sur les consciences, en établissant la confession auriculaire, la nécessité de l'absolution, le sacrifice de la messe et la domination des clercs sur les rois. Ce sont du reste des trompettes de rébellion qui ont mis l'Angleterre en feu et qui ne jurent que par le prétendant [James Francis Edward Stuart]. En vérité, les luthériens sont beaucoup plus près du Royaume des cieux; ce ne sera certainement pas Roberthon qui travaillera à introduire l'ordination, l'épiscopat et les bénéfices sans cure d'âme. Il est persuadé que le pouvoir des prêtres est la source de tous les maux du monde chrétien: il faut laisser à Dieu le soin de faire cette réunification quand il lui plaira puisqu'elle ne peut être qu'un miracle venant de lui. En d'autres mots, on n'amènera jamais au presbytéranisme des gens pourvus de gros bénéfices. À cela, il faut ajouter le peu de religion qui règne aujourd'hui et notamment en Angleterre. On disait dernièrement que le cardinal de Noailles voulait écrire à Wake à propos de l'établissement d'un éventuel patriarche en France pour introduire dansle pays une véritable Réformation. Sur cela certains ministres ont dit qu'il fallait s'y opposer parce que si la France en agissait ainsi, elle deviendrait beaucoup plus riche, n'ayant plus à envoyer d'argent à Rome et ne tolérant plus de moines oisifs, et que cela nuirait à la longue au commerce anglais. Il faut donc préférer une France pauvre et catholique à une France riche et réformée. À entendre ce genre de discours, on voit où on en est. On ne sait pas encore si le roi restera à Hanovre pour l'hiver ou s'il passera la mer en novembre.
[Genève]
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Chetwynd John Dalrymple of Stairs John George I (Angleterre) - Guillaume III d'Orange-Nassau - Herwart Philibert Hill Richard Marie II (Angleterre) - Noailles Louis-Antoine Pelet de Salgas François Robinson John Stuart James Francis Edward Wake William Walpole of Orford Robert ➤ Lister (13)
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