Lettre 2253 de Jean I Barbeyrac à Jean-Alphonse Turrettini

Lettre autographe, signée, adressée. Inédite. (F)
Bibliothèque de Genève, Ms fr 484 (f.124-125)

Je suis bien aise

Il faut que JA ménage sa santé et ses forces, notamment en hiver; il y aurait à craindre puisqu'il doit soutenir une nouvelle dispute publique mais, avec un thème pareil [la christologie], il ne recevra pas d'objections puisque ces messieurs préfèrent emprunter des routes détournées. Il n'a pas encore eu envie de lire la moelle de la théologie que l'auteur [Bénédict Pictet] a envoyée ici [Lausanne] à un de ses amis professeur en théologie mais il sait maintenant, grâce à JA, les efforts qu'on fait pour alarmer les soi-disant hérétiques qu'on n'ose pas attaquer ouvertement. Il remercie JA de lui avoir envoyé l'ouvrage de Leibniz [Théodicée] ; pour ce qui est de celui de [Veyssière] de La Croze [Entretiens], il aimerait également le voir mais s'il n'y arrive pas, ce ne sera pas très grave. Ce moine défroqué a du reste écrit ces Entretiens dans lesquels il attaque [Jacques] Basnage pour se venger du frère de celui-ci [Basnage de Beauval], qui, avant de mourir, avait donné [dans l'Histoire des Ouvrages des Savans] un extrait d'un autre livre de La Croze [Dissertations historiques] que l'auteur n'avait pas apprécié du tout. Il remercie JA d'avoir voulu lui donner ses deux dissertations [Disputatio theologica, 1711]. La dissertation de JA De Christo audiendo lui a fait penser au livre de Locke, Que la religion chrétienne est très-raisonnable, dont le dessein est à peu près le même. À ce propos, [Jacques] Saurin, un jour qu'il prêchait à Amsterdam, avait entrepris de réfuter cet ouvrage et avait traité l'auteur de "grand philosophe, médiocre critique et très mauvais théologien". L'ayant appris au moment où il allait publier sa traduction de Tillotson, Barbeyrac, qui avait déjà décidé de s'en prendre un peu aux déclamateurs, fit le portrait de Saurin sans le citer nommément mais en le rendant très facilement reconnaissable; il fit allusion à ce que le prédicateur avait dit contre Locke. Il a été bien content que [Moïse] Humbert ait été reçu; il connaît sa famille et il espère le revoir. On lui a appris que l'auteur de la moelle de la théologie [Bénédict Pictet] a écrit à [Johann Rudolf] Rudolf de ne pas envoyer des proposants à Genève puisque l'hérésie y avait pris le dessus de façon scandaleuse. Pour ce qui est de sa traduction de Tillotson, il en a très peu d'exemplaires et il doute que les libraires à Lausanne en aient la quantité demandée par JA; il pense même qu'ils n'en ont aucun exemplaire. On l'incite beaucoup à s'atteler au premier volume des Sermons pour remplacer la misérable version de d'Albiac [Amsterdam, 1706], qui s'est débitée à la faveur des autres volumes. Il se souvient que JA lui a offert la vie de Tillotson [Burnet, A Sermon, 1694] quand il était en train de traduire lui-même ce volume, pour qu'il en fasse une version et la mette à la tête de l'ouvrage.

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Genève

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