On ne m'a rendu
Jaquelot est très heureux que JA lui ait envoyé une lettre et l'incite à lui écrire de nouveau et à lui faire parvenir ses ouvrages; il connaît et approuve son dessein et sait qu'il l'exécutera à la perfection. Il parlait récemment au roi [Friedrich I de Prusse] et lui disait combien il était heureux d'être à son service, autant à cause de sa piété que de sa couronne; il n'est pourtant pas courtisan mais il doit reconnaître que c'est le meilleur prince du monde et qu'il protégera toujours l'Égli...
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Lettre autographe, signée. (F) Bibliothèque de Genève, Ms fr 487 (f.265-268)
Budé, Lettres, II, p.110-114.
Jaquelot est très heureux que JA lui ait envoyé une lettre et l'incite à lui écrire de nouveau et à lui faire parvenir ses ouvrages; il connaît et approuve son dessein et sait qu'il l'exécutera à la perfection. Il parlait récemment au roi [Friedrich I de Prusse] et lui disait combien il était heureux d'être à son service, autant à cause de sa piété que de sa couronne; il n'est pourtant pas courtisan mais il doit reconnaître que c'est le meilleur prince du monde et qu'il protégera toujours l'Église pour l'avancement de la piété. Jaquelot a vu la liturgie de Neuchâtel, qui est très bonne; cette Église peut s'estimer heureuse d'avoir un homme comme [Jean-Frédéric I] Ostervald. Il doute pourtant qu'on puisse rétablir la piété par d'autres biais que l'instruction et la connaissance. C'est ce qui l'a déterminé à la méthode qu'il a adoptée dans les Essais que JA a lus. En Angleterre par exemple, où on répond, dans la liturgie, au pasteur, on n'est pas mieux instruit ou plus dévot qu'ailleurs. Il n'y a eu de véritable zèle que pendant les premiers siècles de l'Église et au début de la Réformation et cela parce qu'il s'agissait de temps d'étude et de choix pour tous ceux qui voulaient être chrétiens et réformés. La connaissance conduisait à la piété. Aujourd'hui l'étude de la religion est réservée aux enfants et la piété, privée de la connaissance, dégénère en habitude aveugle et machinale, comme on le voit chez les Juifs et dans les couvents. C'est pourquoi il a cru qu'il serait bon de composer une liturgie qui instruisît l'esprit et touchât le cœur. Il faut changer le moins possible l'extérieur, car le peuple y est très sensible, et s'attaquer davantage à l'essentiel; pour la forme, on devrait juste introduire quelques cantiques ayant davantage de rapport aux mystères. Pour ce qui concerne la réunification, il avait commencé à y travailler par ordre du roi d'Angleterre [Guillaume III] deux ans avant sa mort; il dressa un formulaire qu'il communiqua à l'ambassadeur d'un roi protestant qui l'envoya dans son pays où il fut bien reçu de ceux qui le virent en secret. Les théologiens de ces royaumes sont encore moins traitables que les réformés. On en était là quand le roi mourut. Jaquelot a trouvé le roi de Prusse très bien intentionné mais il faut attendre des temps plus tranquilles. Il a laissé entendre au roi qu'il fallait employer le plus petit nombre de théologiens possible car un professeur pédant voudra défendre tous les détails de son système. Il enverra à JA ce plan à la première occasion. En hiver il fera imprimer un petit Traité de la conformité de la foi avec la raison où il discutera les difficultés de Bayle dans son Dictionnaire et montrera la facilité qu'il y a à s'accorder sur la prédestination. Il faut fonder la réunion sur deux maximes: «il faut garder le silence sur les points controversés non nécessaires au salut» et «il ne faut rien dire contre sa conscience». Pour l'eucharistie, il faut se tolérer car il n'approuve pas ces termes ambigus dans lesquels chaque parti a voulu envelopper sa pensée. Les luthériens accusent les réformés, et non sans raison, d'hypocrisie et de déguisement. Le roi s'est réjoui de la bonne disposition qui se trouve à Genève. Dans un PS, il l'incite à ne plus l'appeler "père" mais "frère".
[Genève]
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