Lettre 2609 de Hans Kaspar II Escher à Jean-Alphonse Turrettini

Lettre autographe, signée. Inédite. (F)
Archives de la Fondation Turrettini (Genève), 1/Gd.E.5

J'ay été fort

Escher est affligé de l'accident arrivé au beau-frère de JA [Jean IV Du Pan] et la ville entière de Zurich a été touchée par cette nouvelle. On aimerait bien faire quelque chose, au vu aussi de la grande réputation dont jouit JA à Zurich, mais il ne voit pas par quels moyens puisque le Canton n'a pas encore reconnu la monarchie de Sicile, ce qui signifie qu'il n'y a aucun rapport entre cette Cour et Zurich. Du reste, il pense que le roi [Victor-Amédée II] a trop engagé sa réputation pour qu'il fasse marche arrière. Les Anglais verront par cette histoire quel prince leur ancien ministère a tant favorisé. La famille d'Escher a connu un cas semblable, il y a une soixantaine d'années: un jeune parent de 13 ou 14 ans [Hans Konrad Werdmüller], frère du côté de la mère du grand-père de l'expéditeur, le bourgmestre [Hans Kaspar I] Escher, se trouvant à Lyon, fut persuadé par les Minimes de se faire catholique et de prendre l'habit. Toutes les démarches qu'on fit auprès du roi [Louis XIII] ne servirent de rien; le garçon fut instruit dans la religion romaine et devint religieux dans l'ordre sus-mentionné. En odeur de sainteté, il fut envoyé à Rome pour devenir prélat. Il passa par la Suisse et à Lucerne il rencontra sa mère qui essaya en vain de le convaincre à revenir au protestantisme. Après cette rencontre, l'envie lui prit de passer quelques temps à Zurich, ce qui lui fut accordé par le nonce [Boccapaduli] en raison de sa fiabilité. Une fois dans la ville, non seulement il resta insensible à tout ce qu'on put lui dire mais il fit tant de prosélytisme qu'il fut obligé de partir. Pourtant, le jour venu, il y eut une telle tempête qu'il dût remettre son départ; on en profita pour lui faire de nouvelles représentations qui, cette fois-ci, le touchèrent à ce point qu'il décida de rester à jamais et de se faire à nouveau protestant. Puis il se maria, devint conseiller et vécut de manière fort édifiante. Cette histoire montre que les voies de l'Éternel sont imprévisibles et qu'il ne faut jamais désespérer. Le père de l'expéditeur [Hans Jakob II] fera néanmoins tout ce qui est en son pouvoir pour seconder JA.

Adresse

[Genève]

Commentaire

La lettre fait allusion à la fugue à Thônon (Haute-Savoie), en août 1715, de Jean IV Du Pan, fils du beau-père de JA, Marc Du Pan. Une fois en Savoie, il fut présenté au roi et à la reine de Sardaigne. Il finit par se convertir au catholicisme et il refusa de regagner sa patrie. Le père saisit le Conseil pour demander un avis et de l'aide et JA sollicita un certain nombre de correspondants en Hollande et en Angleterre mais toutes les démarches restèrent vaines. Un récit de la fugue est livré par JA dans la lettre à Got du 10.09.1715.

Lieux

Émission

Réception

Genève

Conservation

Genève

Cités dans la lettre