2 Lettres

Lettre 1334 de Paul L'Escot Ă  Jean-Alphonse Turrettini

Charleston 06.04.1701

A Carlestown presque

L'Escot est arrivé à Charleston le 15 décembre 1700 après 6 semaines de navigation. Ici presque toutes les maisons sont en bois; lui-même en habite une assez commode avec un jardin et une cour. La vie y est plus chère qu'à Londres et à la fin de l'année, il a entièrement dépensé ses gages. Il y a des fruits en abondance, melons, figues etc. et on cherche à cultiver la vigne pour en obtenir du vin. On utilise pour cela de la vigne sauvage, dont les bois sont pleins, et qui donne du bon vin. Ici o...

+ 2 pages

page 1

arch_tronchin_081_f194r_ug59111_turrettini_file.jpg

page 2


arch_tronchin_081_f194v_ug59112_turrettini_file.jpg

page 3

arch_tronchin_081_f195r_ug59113_turrettini_file.jpg

page 4


arch_tronchin_081_f195v_ug59114_turrettini_file.jpg

Lettre 1334 de Paul L'Escot Ă  Jean-Alphonse Turrettini

Charleston 06.04.1701


Copie. Inédite. (F)
Bibliothèque de Genève, TR 81 (f.194-195)


A Carlestown presque


L'Escot est arrivé à Charleston le 15 décembre 1700 après 6 semaines de navigation. Ici presque toutes les maisons sont en bois; lui-même en habite une assez commode avec un jardin et une cour. La vie y est plus chère qu'à Londres et à la fin de l'année, il a entièrement dépensé ses gages. Il y a des fruits en abondance, melons, figues etc. et on cherche à cultiver la vigne pour en obtenir du vin. On utilise pour cela de la vigne sauvage, dont les bois sont pleins, et qui donne du bon vin. Ici on boit ordinairement une boisson fermentée que chacun brasse soi-même; elle est faite d'eau dans laquelle on a fait bouillir du blé de maïs, qu'on appelle en Europe du blé de Turquie, avec du houblon et du sirop de sucre. On a de très bonnes volailles, du gibier (cerfs etc.), du bon bœuf et du bon veau. On mange aussi beaucoup de cochons d'Indes, les domestiques étant meilleurs que les sauvages. On a aussi beaucoup de poissons et d'huîtres; on raconte d'ailleurs que les sauvages, pendant la guerre, faisaient avec les coquilles d'huîtres des forts capables d'accueillir 40/50 personnes. Les sauvages habitent loin d'ici, on voit seulement ceux qui font commerce de peaux de cerfs. Ils sont fort vilains, couverts d'une simple couverture de laine, à moitié nus. Ceux qui les connaissent bien, disent qu'ils n'ont vu chez eux aucun sentiment religieux; ils n'enterrent pas leurs morts et les laissent sécher à la fumée en plein air. Il y a encore parmi eux des peuplades qui se nourrissent de chair humaine, en particulier celle des Anglais qu'ils trouvent plus délicate. C'est de la pure barbarie. Avant qu'un bâteau en provenance des Îles ne l'apporte, la petite vérole était inconnue; depuis elle a fait des milliers de morts. Leurs médecins pratiquent la succion comme remède universel; ils prétendent que même la goutte se guérit ainsi. En tout cas quand un patient meurt, le médecin court de grands risques. Il y a beaucoup de «nègres» [dans le texte] ; chacun en possède jusqu'à 10 ou 12, certains Anglais en ont 50 ou 60. L'Escot lui-même achètera une «négresse» [dans le texte], dès qu'il le pourra. Chacun d'entre eux, s'il est bon, peut valoir, 60/70 pièces. L'été est une saison pleine d'incommodités: tout brûle et il y a des invasions de serpents. On en compte plus de 12 ou 15 sortes différentes. Plusieurs ne font de mal à personne et sont même très utiles puisqu'ils pénètrent dans les maisons et tuent, mieux qu'un chat, les rats et les souris. Le serpent le plus dangereux est la couleuvre sonnante qu'on appelle ainsi parce qu'elle fait du bruit quand elle bouge. Elle n'attaque pas mais, si elle est touchée, même indirectement, elle se dresse très rapidement et mord et il est très facile d'en mourir. Le remède consiste soit en succion soit (et c'est mieux) en application sur la plaie de six ou sept poules vivantes qui meurent toutes d'abord. Quand enfin une poule survit, cela signifie qu'il n'y a plus de venin. Ces serpents peuvent avaler des animaux; on a trouvé dans leur ventre des lapins tout entiers. On en trouve encore beaucoup dans les plantations mais pas en ville. Sauf les mois d'été, le temps est magnifique; mais en été toujours, on a beaucoup d'insectes de tout genre dont certains font des piqûres qui démangent beaucoup si on les gratte. Dans les rivières, il y a des crocodiles de 12 pieds de long mais on dit qu'ils sont inoffensifs; ils se nourrissent de cochons de lait. Dans tout le pays, les arbres sont pleins de myrthe; on fait bouillir la graine qui produit de la graisse dont on obtient de la cire pour les chandelles. Il y a partout des arbres assez curieux, des gommiers dont on obtient une sorte de résine liquide très odorante, des sassafras, des cèdres qui sont très communs et qui font le matériel de construction le plus répandu pour les bâteaux, les coffres, les planchers, les bières des morts etc. Les vents peuvent être très violents; l'été dernier, il y a eu un ouragan qui a déraciné beaucoup d'arbres et abattu beaucoup de maisons. Il y en a de 14 ans en 14 ans.

Adresse

[Genève]


Lieux

Émission

Charleston

RĂ©ception

Genève

Conservation

Genève


Cités dans la lettre

+ 2 pages

page 1

arch_tronchin_081_f194r_ug59111_turrettini_file.jpg

page 2


arch_tronchin_081_f194v_ug59112_turrettini_file.jpg

page 3

arch_tronchin_081_f195r_ug59113_turrettini_file.jpg

page 4


arch_tronchin_081_f195v_ug59114_turrettini_file.jpg