Comme la terre, après de trop longues et trop fréquentes conversations avec le soleil, se dessèche et crie à plein gosier pour se rafraîchir, ainsi Fabre ressent-il cruellement la séparation de ses amis et vit-il dans une sécheresse pénible. Malheureusement, ce qui aurait dû l'apaiser, l'a attristé davantage, puisque la dernière lettre de JA fait état de ses mauvaises conditions de santé. Fabre incite son correspondant à ménager ses forces, limitant son application à l'étude et à la prédication....
Lettre autographe, signée, adressée. Inédite. (F) Archives de la Fondation Turrettini (Genève), 1/Gd.F.1
Vous scaves sans doute
Comme la terre, après de trop longues et trop fréquentes conversations avec le soleil, se dessèche et crie à plein gosier pour se rafraîchir, ainsi Fabre ressent-il cruellement la séparation de ses amis et vit-il dans une sécheresse pénible. Malheureusement, ce qui aurait dû l'apaiser, l'a attristé davantage, puisque la dernière lettre de JA fait état de ses mauvaises conditions de santé. Fabre incite son correspondant à ménager ses forces, limitant son application à l'étude et à la prédication. Il pourra s'y consacrer à nouveau quand sa santé se sera raffermie. Mais les nouvelles qu'il a de JA lui font penser que ses mots ne seront pas entendus. Fabre se demande si JA ne serait pas un peu allobroge; cette nation là est très mal vue en Hollande. L'on assure que celui qui en est le chef a fait sa paix et renvoyé les alliés manger du céleri vers le milanais. Les espérances de la paix sont parties avec de Callières mais il y a un homme prêt à se venger; on dit qu'il vise une bonne ville pour l'empaumer et se dispose à cela; d'autres disent qu'il voudrait bien épousseter quelques-uns de ses généraux qui n'osent pas partir à l'attaque. Polhill est parti pour l'armée il y a dix jours mais devrait revenir sous peu pour s'embarquer dans la Royale, qui est le meilleur voilier qu'il y ait sur mer. Ils espèrent ne pas rencontrer de pirates ou de gens trop curieux de voir ce qu'il y a dedans. Fabre craint pour les livres que Polhill a achetés en Hollande mais craint encore davantage pour eux deux, qui doivent s'embarquer. JA peut dire à [Jean-Robert] Chouet que Polhill a été bien reçu par Bayle et par [Jacques] Basnage mais la Hollande et les Hollandais ne sont pas du tout de son goût ni de celui de Fabre du reste. Celui-ci a recommandé à plusieurs Anglais qui visitent l'Italie d'aller par la suite à Genève. La seule compagnie qu'il ait en ce moment est celle de Terond. Il envoie ses salutations aux amis et connaissances genevois.
Adresse
Genève
Commentaire
L'enveloppe est adressée à «Monsieur Rodolphe Turretin M.D.S.E.». On sait que la lettre a été écrite depuis La Haye et parce que l'expéditeur donne l'adresse de van Dan (qui habitait à La Haye comme on le sait de par le PS de la lettre de Fabre à JA du 05.06.1696) et parce qu'il dit avoir pour seule compagnie Terond qui était dans la même ville. La datation est proposée par rapport à la lettre du 05.06.1696 dans laquelle Fabre faisait état de sa tristesse après avoir quitté ses amis genevois et racontait l'étape faite à Lausanne. Cette lettre doit donc être antérieure à la présente, où l'on constate que Fabre désormais est en Hollande. Il l'a par ailleurs signée du pseudonyme de Fabriccio.