Lettre 3307 de Ernst Salomon Cyprian Ă  Jean-Alphonse Turrettini

Lettre originale non autographe, signée. Inédite. (L)
Archives de la Fondation Turrettini (Genève), 1/Gd.C.39

In literis tuis

Comme JA, Cyprian est convaincu qu'il faut tout mettre en œuvre pour contrer la papauté. Il estime qu'il faudrait éviter, dans le camp protestant, de s'adonner à des querelles acerbes et qu'il faudrait se tolérer mutuellement; pourtant il ne faudrait jamais négliger la doctrine du mérite du Christ, celle de l'universalité de la grâce et les autres vérités clairement révélées. Il faudrait aussi unir les efforts contre les machinations romaines et faire toujours preuve de charité chrétienne. C'est ce que fait son prince [Friedrich II de Saxe-Gotha] dans tous ses discours et, chez eux, les réformés sont tolérés et peuvent professer librement leur foi si bien que l'échanson du prince en est un. Par contre, il ne pense pas que les temps soient mûrs pour obliger les ecclésiastiques, dont l'esprit n'est pas suffisamment préparé; il sait du reste avec assurance que de nombreux et grands hommes, qui, avec d'autres parfaitement pieux, incitent à la réunification, sont poussés vers la paix non pas par l'esprit du Christ mais par l'athéisme. Il y a encore deux choses dont il faudrait se défaire lors d'un engagement ecclésiastique, à savoir la propagande de la doctrine calviniste et la haine à l'égard des luthériens. Pour ce qui est des doctrines de Calvin et du synode de Dordrecht, elles se sont répandues en Allemagne et insinuées en maints endroits, en balayant la doctrine évangélique sur l'universalité du mérite du Christ et en envoyant les luthériens en exil. Cyprian tient tellement à cette doctrine, que Christ lui-même a confirmée par son sang et sa mort, qu'il ne peut pas être solidaire de ceux qui l'oppressent. Tout espoir d'enlever l'erreur et d'améliorer ce qui est dit par Hottinger dans une dissertation récente [Exercitatio irenica] est tombé et les théologiens suisses laissent entendre, dans une épître à Wake qui n'a pas encore été publiée, que les luthériens devront accepter les doctrines calvinistes. En Allemagne on assiste quotidiennement à des manifestations de haine, alors que les princes réformés, en contradiction avec la paix de Westphalie, abrogent la Formule de concorde et marginalisent les luthériens. Ces mêmes princes ont promis de garder tous les privilèges ecclésiastiques aux États luthériens de leurs provinces mais la réalité, dont il donne quelques exemples, est autre. C'est pourquoi les luthériens allemands doivent faire attention à ne pas se faire dévorer. Pour être franc, Cyprian ne cache pas son désaccord avec ce que JA dit dans l'une des thèses de ses Cogitationes de variis theologiæ capitibus; les luthériens ne méritent pas d'être appelés anthropophages ou théophages, comme il ressort de plusieurs endroits de la Formule de Concorde. Pour ce qui le concerne, il s'engagera à enlever tout ce qui entrave la réunification. Il remercie JA de toutes les honnêtetés dont [August Gotthelf] Graff a été gratifié. Le prince lui a envoyé une lettre pour JA avec deux petits écus où sont gravés des vers de l'Enéide. Depuis des années il n'avait pas lu, l'Écriture mise à part, quelque chose de plus savant et de plus utile que le traité de la vérité de la religion chrétienne de JA [Disputatio, pars prima-sexta (?), 1721-1723].

Adresse

[Genève]

Commentaire

Lettre d'une autre main, inconnue, mais avec entĂŞte de Cyprian. Minute autographe Ă  FLB, Chart. A 427, Bl. 8-12. Copie Ă  CCL, dans les Archives Wake, Epistola 31 (168).

Lieux

Émission

RĂ©ception

Genève

Conservation

Genève

Cités dans la lettre