5000 Lettres

Lettre 27 de Jean-Alphonse Turrettini à Theodor Gernler

Genève ap.23.04.1686 [s.d.]

In more olim

Gernler a reproché à JA son attachement aux hypothèses cartésiennes qui, d'après lui, sont dénuées de fondement. En faisant cela, son ami a oublié qu'il vient de commencer la philosophie et qu'il serait téméraire de sa part de vouloir prendre position dans des disputes qui divisent les savants. Cela dit, il se demande pourquoi le sort de ceux qui embrassent les doctrines de Descartes devrait être lamentable. Il est vrai qu'il y a dans la métaphysique et dans la pneumatologie de Descartes des cho...

Genève ap.23.04.1686 [s.d.]


Minute autographe, adressée. Inédite. (L)
Archives de la Fondation Turrettini (Genève), 1/Gb.1.21.XIX [1/Gd.12.15]


In more olim


Gernler a reproché à JA son attachement aux hypothèses cartésiennes qui, d'après lui, sont dénuées de fondement. En faisant cela, son ami a oublié qu'il vient de commencer la philosophie et qu'il serait téméraire de sa part de vouloir prendre position dans des disputes qui divisent les savants. Cela dit, il se demande pourquoi le sort de ceux qui embrassent les doctrines de Descartes devrait être lamentable. Il est vrai qu'il y a dans la métaphysique et dans la pneumatologie de Descartes des choses qui sont contraires non seulement à la raison mais aussi à la foi orthodoxe (comme par exemple quand il met en doute l'existence de Dieu et fait consister l'essence de l'esprit dans la pure pensée) ; il est vrai également que les partisans de Descartes ont avancé beaucoup de choses ridicules et impies qui vont au-delà de la pensée de leur maître. Il n'en demeure pas moins que ce philosophe qui, au dire de Des Marets dans son De abusu philosophiæ cartesianæ, est l'un des ornements de ce siècle, a découvert beaucoup de choses qui, dans le domaine de la nature, étaient obscures. C'est pourquoi JA partage ce que dit ce théologien quand il affirme que ceux qui dénient tout mérite à Descartes sont animés soit par la jalousie soit par l'ignorance. C'est pour cette raison que Gernler ne doit pas considérer comme absurdes ou impies les doctrines d'un philosophe qui a reçu les éloges d'un si grand théologien. L'expéditeur passe ensuite à la question des comètes dont son correspondant lui a parlé dans sa dernière lettre. D'après Descartes, les comètes ne sont rien d'autre que des étoiles fixes qui se sont détachées du tourbillon au centre duquel elles se trouvaient et, traversant les tourbillons d'autres étoiles, sont parvenues à la surface du tourbillon solaire. Il ne faut donc pas considérer comme absurde l'idée que JA avait avancée selon laquelle certaines comètes rivalisent, en grandeur, avec des étoiles fixes puisque certains philosophes d'aujourd'hui, et pas des moindres, considèrent justement les comètes comme des étoiles fixes. Il n'avance pas cela comme quelque chose de vrai mais comme quelque chose de probable, non pas comme une opinion personnelle mais comme la doctrine de certains philosophes et de Descartes en particulier. Il tâchera donc de répondre aux objections de son correspondant en se servant des arguments de Descartes lui-même. En premier lieu, Gernler se demande pourquoi le revêtement des comètes serait la cause de leur sortie du tourbillon. Descartes donne plusieurs explications à cela. La première concerne la distinction qu'il faut faire dans les comètes entre la matière qui les compose (qui est la même) et la forme, le mouvement et les dimensions qui sont différents, de telle sorte qu'on peut établir différentes sortes de comètes. La deuxième a affaire aux lois du mouvement qui font que les corps ont tendance s'éloigner de leur centre. La troisième aux tourbillons. Il développe amplement chacune de ces explications. Il se permet de ne pas répondre à la dernière question de Gernler qui aurait aimé savoir s'il adhère ou pas au copernicanisme; comment pourrait-il prendre parti lui qui n'est qu'un jeune étudiant?

Adresse

[Suisse]


Lieux

Émission

Genève

Réception

Suisse

Conservation

Genève


Cités dans la lettre