JA, accablé depuis 15 jours par une fièvre double-tierce, n'a pas pu remercier plus tôt Le Clerc pour les livres qu'il lui a envoyés. Il avait déjà les premières éditions de ses ouvrages – dont certains, comme le Pentateuque et les œuvres de philosophie, lui venaient directement de l'expéditeur – mais il est fort aise de posséder maintenant aussi les nouvelles. Il a trouvé beaucoup de changements et d'augmentations dans l'Ars critica [Amsterdam, 1712] dont il n'avait que la Ière
Lettre autographe, signée, adressée. (F) Universiteits-Bibliotheek (Amsterdam), R.K. C 155
Sina, Epistolario, III, p.411-414.
Sans une fievre
JA, accablé depuis 15 jours par une fièvre double-tierce, n'a pas pu remercier plus tôt Le Clerc pour les livres qu'il lui a envoyés. Il avait déjà les premières éditions de ses ouvrages – dont certains, comme le Pentateuque et les œuvres de philosophie, lui venaient directement de l'expéditeur – mais il est fort aise de posséder maintenant aussi les nouvelles. Il a trouvé beaucoup de changements et d'augmentations dans l'Ars critica [Amsterdam, 1712] dont il n'avait que la Ière édition [Amsterdam, 1697]; il la recommande sans cesse à ses étudiants (comme les autres ouvrages de Le Clerc) et la présente comme une introduction admirable à l'Écriture. Même s'il est regrettable que beaucoup de monde attaque Le Clerc, cela lui donne l'occasion de dire beaucoup de belles choses, comme dans les Sylvæ philologicæ où il donne une très belle idée de l'étude des belles-lettres. Il espérait trouver dans le Sulpice Sévère des notes sur son histoire sacrée, comme Le Clerc sait les faire; ce qu'il y a trouvé est nénmoins très utile. Quant à la vie de Le Clerc lui-même, JA disait récemment à quelqu'un qu'il n'y avait pas de prince, de politique ou de général dont la vie lui apparaîtrait au-dessus de celle de son correspondant; il y a quelque chose de très noble dans cet amour de la vérité et dans cette hardiesse à le dire, dans ce travail infatigable et dans ce soin à inspirer aux lecteurs le christianisme véritable. Il le remercie aussi de la belle édition du Nouveau Testament de Mill [Rotterdami, 1710], préférable à celle d'Angleterre [Oxonii, 1707]. Il aimerait être dans un pays où l'on produit quelque chose de valable pour le lui envoyer; mais on n'y trouve rien qui vaille, seulement de misérables rhapsodies sans goût ni discernement ni utilité. On est inondé par les medullæ theologiæ, medullæ ethicæ etc; à ces petits volumes est venu s'ajouter un gros, que JA n'a pas encore lu, une Histoire de l'Église et du monde pour servir de suite à Le Sueur; il y a deux tomes qui font le XIe siècle. Il faudrait une autre tête et une autre plume pour une telle œuvre. Cet homme [sc. Bénédict Pictet], qui n'a jamais eu beaucoup de goût, déclare depuis quelques temps une guerre ouverte au sens commun. Il s'insurge contre la critique en y voyant la source de toutes les hérésies. Il défend à ses étudiants de lire Grotius et Hammond et critique ouvertement dans ses leçons publiques Le Clerc (qu'il cite souvent), en disant que lui et les autres hérétiques, quand ils sont embarrassés par quelques passages de l'Écriture, vont chercher dans Sophocle ou autre des passages obscurs pour s'en autoriser. JA prie Le Clerc de choisir en Angleterre ou en Hollande quelques livres qui lui conviennent pour la somme de 100 florins qu'il recevra par le biais de [Jacob] Gallatin. Il demande le prix d'un certain nombre d'ouvrages d'Érasme, Augustin, Surenhuys. Les projets par rapport à l'Angleterre sont renversés car tout est à craindre pour ce pays-là. JA est sûr que Le Clerc a succédé à Limborch. C'était un homme sage et modéré et, quoi que vieux, on le regrette.
Adresse
Amsterdam
Commentaire
L'allusion à la mort de Limborch permet de rétablir le millésime. L'identification de Jacob Gallatin (au lieu d'André proposé par Sina, Epistolario, III, p.247 et 414) est établie sur la base de la lettre 2293.