Lettre 2229 de Jean-Frédéric I Ostervald à Jean-Alphonse Turrettini

Lettre autographe. (F)
Bibliothèque de Genève, Ms fr 489 (f.357-358)

Extrait dans Gretillat, Ostervald, p.XXXIV, n°67.

J'ay eté si accablé

Accablé par de nombreuses occupations, Ostervald n'a pas pu écrire récemment à JA mais il a appris que sa santé allait mieux. Il lui donne les dernières nouvelles dans l'affaire du ministre accusé de tentative de débauche [Huguenaud] et qui s'est finalement terminée. Sur l'accusation en question, on n'a pu le déclarer ni coupable ni innocent puisqu'aussi bien lui que la femme [Madame Cosandier] ont persisté dans leurs allégations. Entre temps de très nombreux bruits avaient commencé à circuler faisant plâner des soupçons sur sa chasteté; on l'a accusé, entre autres, d'avoir poussé une femme contre un lit jusqu'à faire tomber les rideaux. Il a admis le fait mais a prétendu qu'il n'avait pas eu de méchantes intentions et que les rideaux étaient tombés pour une autre cause. Concernant une autre accusation de tentative de corruption pendant qu'il était ministre adjoint, il a dit ne pas se souvenir du fait. Compte tenu de tout cela, la Compagnie a décidé 1) de l'ôter de son Église sur le champ 2) de le suspendre et l'interdire de toutes fonctions 3) de juger par la suite des autres accusations et bruits. Ces décisions ont été prises sur la base de la réputation du ministre, devenue très mauvaise; des aveux obtenus; du fait qu'il a dit ne pas se rappeler une certaine circonstance alors qu'on doit pouvoir exiger d'un ministre qu'il se souvienne de ce genre de choses. Il demande à JA la discrétion sur tout cela. Peu de jours avant, Ostervald avait envoyé à leur ami de Bâle [Samuel Werenfels] une pièce très curieuse qu'il faut que JA voie aussi l'un de ces jours. Il s'agit d'un traité de Bullinger intitulé De moderatione servanda dans les questions de la prédestination avec un appendix qui contient l'explication des passages se rapportant à cette question et en particulier de ceux qui semblent faire de Dieu l'auteur du péché. Ce sont des pièces très sages et très solides; après les avoir lues, il a compris pourquoi les arminiens disaient, au siècle passé, qu'ils suivaient les sentiments de ce réformateur. Il se rappelle du reste avoir lu dans les Præstantium virorum epistolæ un passage dans lequel Nielle ou quelqu'un d'autre disait que Bullinger avait sur cette matière des opinions très différentes des autres réformés. En effet il affirme l'universalité de la grâce et même sa suffisance et réduit l'élection à la prévision. Il a copié avec [Charles] Tribolet cet écrit d'un volume manuscrit de Bullinger qu'on lui a envoyé de Zurich et il l'a envoyé à Werenfels. Une fois qu'il lui aura été retourné, il l'enverra à JA. Il faudrait imprimer cette pièce mais on ne le veut pas à Zurich, peut-être pour la même raison pour laquelle Bibliander a été destitué. Pourtant on peut s'en servir pour fermer la bouche à ceux qui crient à l'hérésie quand on ne suit pas aveuglément les sentiments de Calvin. Il n'a pas de nouvelles d'Angleterre et la Société semble faire bien peu de choses avec ses correspondances.

Adresse

[Genève]

Commentaire

Lieux

Émission

RĂ©ception

Genève

Conservation

Genève

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